Résumé des épisodes précédents :
L’erreur qu’on a pu lire dans la chronique mensuelle de décembre a tourné en boucle pendant plusieurs semaines dans le bandeau déroulant du site de la compagnie : j’annonçais une représentation à Rousset en région Lyonnaise, alors même que cette jolie commune se trouve dans les Bouches-du-Rhône, au pied de la montagne Sainte-Victoire. C’est le contrat d’embauche qui m’a trompé, il était annoncé Rousset (69), je n’ai pas vérifié... C’est seulement le matin même de la représentation, gare de Lyon, que j’ai appris de mes collègues qu’on resterait dans le TGV jusqu’à Aix-en-Provence.
L’erreur n’a pas eu de grave conséquence, je n’ai pas eu vent de spectateur arpentant désespérément les monts du Lyonnais à la recherche d’un quelconque « Mariage de Figaro ». Pas grave donc, mais révélateur du changement advenu dans ma vie professionnelle. Il y a quelques années je ne me serais pas trompé en lisant le contrat. C’est moi qui l’aurais écrit. Et avant sa rédaction, il y aurait eu la promotion, les relances téléphoniques, le premier contact, les échanges de courriels, le repérage technique... Il n’y aurait pas eu de rectification le jour même, gare de Lyon, je serais parti, l’avant-veille, de Chédigny au volant de mon antique camionnette que j’aurais moi-même chargée... C’est peu dire que je savoure ce nouveau confort : ne faire que le comédien, ne me soucier que de mon rôle (quelques minutes sur un plateau) et du numéro de la chambre d’hôtel (veiller à ce qu’il corresponde bien à celui de la clef). Une saveur un peu suspecte aux relents d’infantilisation... Mais je ne vais pas bouder un plaisir qui reste si précaire.
On s’habitue vite aux grandes salles, elles n’ont pas autant de charme que les vieux théâtres mais elles sont confortables, accueillantes et, paradoxalement, on s’y sent moins fragile... Récemment, à la périphérie de Rennes, j’ai découvert le « Carré Sévigné ». On l’appelle ainsi car son toit est carré. C’est du moins tel qu’il apparaît d’en haut, vu d’avion ou sur un plan. Mais comme c’est toujours d’en haut et sur un plan qu’on décide, j’imagine que les décideurs ont décidé, dans un même élan, du nom et de la chose. Pourtant, en arrivant au « Carré Sévigné », ce n’est pas le toit qui m’a surpris, ce sont deux panneaux photocopiés scotchés sur la vitrine d’entrée : « Contrôle Hommes », « Contrôle Femmes ». Il ne m’en a pas fallu plus pour commencer à débiter des a priori stupides sur la Bretagne profonde et sa supposée manie de la ségrégation héritée d’un catholicisme hors d’âge. Mes collègues m’ont aussitôt corrigé : « Allons, c’est toi qui retarde d’un épisode, voyons... C’est juste pour la palpation ».
Où avais-je la tête ? J’avais oublié que la palpation est désormais un passage obligé dans toutes les salles de France et de Navarre ! Et comme il n’est pas question de confondre sécurité et gaudriole, on se palpe entre soi : les dames avec les dames et les messieurs avec les messieurs ! J’enchaînai alors sur des considérations oiseuses : est-ce que les palpeuses sont pulpeuses ? Est-ce que les palpeurs ont des têtes de videurs... Puis des considérations scientifiques : sachant qu’on refuse du monde et que la salle contient sept cents spectateurs, soit autant d’entrejambes et deux fois plus d’aisselles, à quelle heure la palpation collective doit-elle commencer pour que l’horaire de la représentation soit respecté ? Je m’avisai que les salles de théâtre sont majoritairement fréquentées par des femmes. Je m’inquiétai : cette vérité statistique avait-elle été bien prise en compte par l’organisation ? Avait-on procédé à l’embauche de palpeuses surnuméraires ? La fonction de palpeur(se) requiert-elle une formation spécifique ? Relève-t-elle des annexes 8 et 10 de la convention Unedic relative aux métiers du spectacle ? J’en étais là de mes considérations quand le spectacle a commencé. On était à l’heure, la salle était pleine, l’enthousiasme était... palpable.
Pas de « Mariage de Figaro » en ce long mois de février. Non plus que de rendez-vous avec le théâtre de la Fronde (on commence à s’y habituer). Heureusement, du mardi 9 au samedi 13 février, à 20h, je retrouverai Pauline Vaubaillon (l’élève) et Nicole Huc (la bonne) pour jouer « La Leçon » d’Eugène Ionesco au théâtre de la Huchette (réservation au 01 43 26 38 99). Le théâtre de la Huchette, c’est (ne l’oublions pas) : une cinquantaine de comédiens, des jolis fauteuils tout neufs et dédicacés, un directeur tout neuf, lui aussi, une cantatrice chauve, une Kiki de Montparnasse, une leçon de doctorat total, cinquante-neuf ans de succès sans interruption (record du monde), de l’humour Anglais, de l’absurde, de l’audace et toujours de l’audace... Dans cet inventaire à la Prévert, il manque juste... des palpeurs.
La prochaine représentation en Touraine du Théâtre de la Fronde, prévue le 22 mars, aura-t-elle lieu dans :
Vous le saurez, bientôt, en lisant « Les nouvelles de février » !
Dans l’attente :
Les huissiers les pourchassent ! Le succès les guette !
- Nos amis s’en sortiront-ils ?
- Bien sûr !
- Mais comment ?
Vous en saurez un peu plus en surfant sur notre site : http://www.theatredelafronde.com.
Vous pourrez également voir notre photo du mois dont la légende commence par ce mot : « Tous... »