Nouvelles de juin 2014 - Rendez-vous de juillet 2014

Notre nouvel épisode :

The show must go on

Résumé des épisodes précédents :

« Il est bien ton spectacle, Jean-Marie, dommage que je ne l’aie pas vu ». C’était en décembre dernier, dans la loge de la Huchette, nous nous préparions pour « La leçon » et l’après-midi même, Lucile et moi avions donné une représentation de la « Corde sensible ».

- Je ne comprends pas, Catherine, tu l’a vu ou pas, le spectacle ?
- En fait j’étais dans la salle mais je n’ai rien vu. Je ne peux plus voir.

Catherine Day m’explique alors ce qu’est la DMLA, cette maladie qui lui permet, tout juste, de distinguer l’ombre de la lumière.

- Mais Catherine, on monte sur le plateau dans trois minutes ! Comment tu vas faire ?

Catherine me rassure : la maladie s’est installée progressivement, elle s’est habituée, elle se guide à la voix, le plateau est tout petit et elle l’arpente depuis si longtemps...
Depuis 57 ans, « La cantatrice chauve » et « La leçon » sont jouées sans discontinuer, c’est un phénomène unique au monde et c’est ce qui fait le renom de cette minuscule salle Parisienne. J’ai rejoint l’aventure collective depuis seulement quatre ans mais d’autres sont là depuis le début ! Par intermittence, bien sûr : on est cinq comédiens par rôle et on combine les distributions en fonction de la disponibilité de chacun.
Depuis, Catherine a subi une intervention, aujourd’hui, elle va et elle voit beaucoup mieux, nous jouons ensemble, cette dernière semaine de juin, j’ai beaucoup de plaisir à partager ainsi le plateau avec, dans le rôle de « la bonne », des interprètes telles que Catherine Day ou Jacqueline Staup, le temps les a rendues fragiles, vulnérables, extraordinairement émouvantes et paradoxalement leur donne une autorité, comme venue du fond des âges. Elles ont des carrières extraordinaires (« Ascenseur pour l’échafaud », « Belphégor »...) qu’elles poursuivent avec entrain (Jacqueline vient d’obtenir un prix dans un court métrage et Catherine nous a annoncé cette semaine qu’on la verrait moins à la rentrée pour cause de tournée en province). La Huchette reste leur port d’attache.

Je n’ai jamais joué avec Frédérique Villedent, elle a pourtant interprété « l’élève », pendant des années. Elle l’a même joué au grand théâtre de Tours dans la programmation d’André Cellier mais j’étais alors élève comédien, puis elle est passée de « La Leçon » à « La cantatrice » (dans le rôle de « Mrs Martin »). On se croise régulièrement dans la loge car celle-ci est commune, les uns reprennent leurs habits de ville pendant que les autres enfilent leurs costumes de scène. Il y a un an, je m’étais amusé à photographier l’incroyable arsenal de maquillage que Frédérique étale devant son miroir à chaque représentation (voir mars 2013 à la rubrique « photo du mois » du site theatredelafronde.com). Frédérique est vive, coquette, pétulante. Il y a trois semaines, outre les bâtons de maquillage, il y avait une photo accrochée. C’était une photo en noir et blanc, on reconnaissait Frédérique, toute jeunette, dans la fameuse robe vichy qui est, encore aujourd’hui, la tenue de « l’élève » dans « La leçon ». Dès le mardi soir, Frédérique nous avait annoncé une fête à la cave pour le vendredi suivant ; il y a, en effet, une cave, à la Huchette, sous la salle de spectacle, qui abrite l’administration et qui sert de foyer pour les artistes. Après notre représentation, le vendredi soir, on a donc retrouvé nos collègues de « La cantatrice » qui ne nous avaient pas attendus pour entamer les hostilités avec la gastronomie Grecque du voisinage, feuilles de vigne farcies, Ouzo, pâtisseries... la soirée était joyeuse, sans objet précis, on arrosait simplement le retour du printemps...
Le lendemain, de nouveau réunis dans la loge, on remerciait et on félicitait Frédérique. Elle était souriante, comme à l’accoutumée : « Oui, c’était une belle fête... Et je suis contente de l’avoir organisée un vendredi, comme ça ceux de « La leçon » ont pu nous rejoindre... On était ensemble... Le samedi ç’aurait été moins bien, on a tous hâte de rentrer... - elle hésita soudain - mais quand même, j’aurais préféré faire ça aujourd’hui... Parce que... Voyez-vous... Faut que je vous dise : ce soir, c’était ma dernière représentation. »
Frédérique n’est pas du genre à trop s’apitoyer sur elle-même, elle a coupé court à notre élan de sympathie. « Bon, ça va comme ça. Pas de pathos... Ça fait 32 ans que je bosse là... Je préfère partir quand ça va encore... Je viendrai vous applaudir... Maintenant on arrête, vous allez me faire pleurer et il y en a qui jouent dans deux minutes. »
Il y a une formule célèbre, en Anglais, qui se dit dans ces moments-là et qui traduit bien l’impérieuse nécessité d’aller de l’avant, de poursuivre le spectacle... Elle va plus loin cette petite phrase anglaise, elle nous fait sentir combien le spectacle nous dépasse, à quel point nous n’en sommes que les provisoires et précaires serviteurs. Quand je joue à la Huchette, je pense parfois à ceux qui m’ont précédé dans la loge, certains ont eu une carrière éclatante (Belmondo, Terzieff)... Curieusement, le plus célèbre des habitants de la Huchette y jouait... aux billes.
Ses parents tenaient un restaurant Arménien dans le quartier, il se nommait Chanour Aznavourian... Maintenant, on dit Charles...

Les étapes estivales de notre tout nouveau « Mariage de Figaro » auront lieu au Château de Terre Neuve à Fontenay-le-Comte (85), le vendredi 25 juillet à 21h30 (réservation au 02 51 69 99 41) puis à Sarlat (24200), place de la Liberté, le dimanche 27 à 21h30 (réservation au 05 53 31 10 83).

Le magnifique accueil réservé à notre création par le Festival d’Anjou trouvera-t-il écho à Fontenay-le-Comte et Sarlat (et au-delà...) ?
Quand
« Le Rhinocéros » et « La Leçon » seront-ils associés en une même soirée ?
A quand la première de
« La bourriche » avec Philippe Boisneau (pêcheur de Loire), Jean-Marie Sirgue (comédien) et Bernard Charret (chef cuisinier) ?
Serge Rigolet va-t-il pouvoir bientôt réenfiler les bretelles de son accordéon ?
A quand
« La corde sensible » à la Huchette ?
Une subvention de 1900 € va-t-elle être votée par le Conseil Général 37 au théâtre de la Fronde ?
Faut-il en rire ou en pleurer ?

Les huissiers les pourchassent ! Le succès les guette !
- Nos amis s’en sortiront-ils ?
- Bien sûr !
- Mais comment ?

Vous le saurez bientôt, en lisant « Les nouvelles de juillet » !
Vous en saurez un peu plus en surfant sur notre site : http//www.theatredelafronde.com (le site a été remanié, en profondeur : l'apparence est la même mais les rubriques sont plus faciles d'accès - en particulier nos chroniques - il va s'enrichir dans les semaines à venir).

Et beaucoup plus en venant assister à l’une de nos prochaines représentations.

À suivre...