Nouvelles de juillet 2011 - Rendez-vous d'août 2011

Notre nouvel épisode :

Aux marches du palais

Résumé des épisodes précédents :

Imaginer la tête des responsables de la Chambre de Commerce d’Avignon devant cette hérésie économique suffit à me mettre en joie : à deux pas du Palais des Papes, dans un des secteurs les plus commerciaux de la ville entre une boutique de mode et un bistrot branché : la boutique du vieux cordonnier.

En passer le seuil est une épreuve pour les narines : ça sent le vieux cuir et la poussière. Les murs ont disparu mais on aperçoit le comptoir au fond du magasin, on le rejoint en sinuant entre deux haies de godasses, quelques vêtements sont accrochés à des portants ; on trouve également un stock de livres, uniquement de la littérature de gare mais des gares d’avant le TGV, des gares de l’époque où Gérard de Villiers et Guy des Cars suffisaient à vous coller la nausée en attendant la micheline. Le vieux cordonnier est derrière son comptoir, il n’aime pas cela, d’ordinaire c’est sa femme qui occupe ce poste mais cette année je ne l’ai pas vue (je n’ai pas osé poser de question), il ne tient pas en place, il ne bouge pas vite mais il se déplace sans cesse, il arpente la boutique, sort dans la rue, distribue des balles de tennis aux chiens des marginaux qui hantent les trottoirs, revient, gagne l’arrière-boutique où il ressemelle une chaussure (ses gestes sont alors étonnement rapides et précis), retourne vers le comptoir où il se décide enfin à servir le client qui achète... des fruits.
Eh oui : entre ses fringues, ses godasses et ses bouquins, le vieux cordonnier vend les meilleurs fruits d’Avignon ! Il n’y en a pas beaucoup, il les apporte le mardi, les range sur des cageots le long de la porte, il y a là des pêches, des nectarines parfois, des abricots et quelques légumes. Les habitants du quartier et quelques festivaliers sont aux aguets, le stock disparaît en deux jours. Le reste de la semaine, les clients sont plus rares.
Je ne suis Avignonnais que trois semaines dans l’année (et encore pas tous les ans) mais je suis un fidèle du vieux cordonnier, depuis si longtemps qu’il m’apprécie (il est vrai que je ne manque pas de lui rapporter ses cageots vides et c’est un geste auquel il est sensible), pour la première fois, cette année, je me suis permis de lui poser quelques questions...
« Cinquante-deux ans, Monsieur. Cinquante-deux ans que je suis là, alors vous comprenez, je ne peux pas m’arrêter maintenant, c’est ce qui me tient, à mon âge... Aujourd’hui les affaires ne marchent plus guère mais dans le temps, vingt-huit qu’on était à travailler là-dedans : vingt-six ouvriers plus ma femme et moi... » Le vieux est devenu intarissable : « Je dis là-dedans mais il y avait quatre magasins dans la ville, plus l’atelier ! On faisait la fabrication, les réparations, l’entretien. Parce qu’à l’époque, Monsieur, les chaussures on les entretenait, on les réparait, on les gardait... Mais notre premier travail c’était la fabrication, notre clientèle c’était la bourgeoisie de la ville, les haras aussi, les bottes de cavalerie... Des gens qui connaissaient la valeur des choses... Mon métier ce n’est pas cordonnier, Monsieur, je suis maître bottier ! » Il en avait à dire sur son magasin, le vieux cordonnier, et je serai bien resté la matinée à l’écouter mais avec deux représentations par jour, trois spectacles différents et trois fois sept mille prospectus à distribuer... Je l'ai abandonné derrière son comptoir en emportant un des derniers cageots de nectarines, j’étais, sans doute, un de ses derniers clients, il allait passer le restant de la semaine à réparer des chaussures que personne n’achèterait jamais
Sera-t-il encore là, l’an prochain, le maître bottier, ou devrais-je acheter des brugnons insipides au Proxi Market de la rue Carnot (celui qui se tient en lieu et place de la magnifique librairie Amblard) ?
Peut-être même y aura-t-il bientôt, à cet endroit, « le théâtre de la cordonnerie ». C’est les responsables de la Chambre de Commerce qui seront contents. Avignon est bien la seule ville où transformer une boutique en théâtre n’est pas considéré comme une hérésie économique.

En attendant le retour dans la cité des papes, un passage dans la cité des princesses et des princes : représentation de « Rhinocéros » au Fort Antoine à Monaco le lundi 8 août à 21h30. Retour en Touraine le jeudi 11 août à 21h : « Les nouvelles de mon cru » à nouveau devant le castelet du parc littéraire de la Tour à Saint-Cyr, réservation auprès de la compagnie Mariska au 02 47 32 95 85. Quatre jours à Chédigny pour le festival de Blues et Musiques Cubaines les 11, 12, 13 et 14 août (je m’occuperai de la sécurité du site). Enfin une petite semaine au théâtre de la Huchette avec « La Leçon » du 16 au 20 août, réservation au 01 43 26 38 99...
Les vacances approchent.

Quel est le bilan du festival d’Avignon ?
Qu’advient-il du
« Capitaine Le Jan » ?
Qui sera la jeune et talentueuse violoncelliste qui rejoindra la compagnie pour apporter aux
« Nouvelles de mon cru » un écrin musical ?
Quelle sera notre prochaine « photo du mois » ?
Nos plates excuses pour la livraison tardive de cette lettre seront-elles acceptées ?

Le succès les guette, les huissiers les pourchassent !
- Nos amis s’en sortiront-ils ?
- Bien sûr !
- Mais comment ?

Vous le saurez bientôt, en lisant « Les nouvelles d'août » !
Vous en saurez un peu plus en surfant sur notre site : http//www.theatredelafronde.com

Et beaucoup plus en venant assister à l’une de nos prochaines représentations.